Restreindre le droit des plus prospères de nuire au plus grand nombre pour garantir la possibilité d’un vivre-ensemble est une mesure non seulement raisonnable mais nécessaire.
La droite n’a pas encore fait le deuil de la croissance infinie et du mythe que celle-ci profiterait à toutes et tous. Elle s’y accroche même comme un morpion à son ADN de classe, mais les faits sont tenaces et démontrent que l’urgence climatique renforce les inégalités sociales et qu’il faut lutter aussi résolument contre l’une que contre l’autre. L’espérance de vie en bonne santé entre personnes de niveau de scolarité obligatoire et celles au bénéfice d’un niveau d’études supérieur s’est creusé de 7.6 à 8.8 ans chez les hommes et de 3.3 à 5 ans chez les femmes. [1]
La psychologue Elisabeth Kübler-Ross a décrit les cinq stades du deuil comme suit : le déni, la colère, le marchandage, la dépression, l’acceptation.
Tristement, face aux mesures devant être prises de toute urgence pour faire évoluer nos manières de vivre, de consommer, d’impacter l’environnement et notre vie en société, la droite butte encore sur le premier stade, et résiste massivement, faisant croire que le changement c’est la tyrannie, et le retour en arrière la liberté… pour, au final, prêcher qu’il ne faut surtout rien changer, ou que le changement viendra de lui-même, de façon spontanée et vertueuse, caricaturant celles et ceux qui veulent une autre société en ayatollah ou autres ridicules exagérations.
Le discours de la droite face au deuil de la croissance infinie :
1) Déni : il fait chaud, oui, mais pas plus que d’habitude. Ce sont des variations saisonnières, de toute manière grâce à la technologie, aux voitures électriques, une poudre de perlimpinpin que l’on va inventer dans peu de temps, tout ira pour le mieux.
2) Colère: c’est de la faute aux cyclistes, aux gauchistes, aux féministes, on ne peut plus rien dire, on ne peut même plus prendre son SUV pour aller acheter son pain. Ils nous dégonflent même les pneus de nos grosses bagnoles quelle insupportable atteinte à notre liberté de polluer et de nous moquer du monde entier.
3) Marchandage: oui, c’est vrai, la situation peut-être vue comme alarmante. Il faudrait prendre des mesures, mais il faut encore une étude pour l’évaluer et surtout ne rien faire de contraignant. Garantissons le libre choix de rouler en SUV en ville et garantissons la liberté de se tartiner au gasoil, d’enfumer son voisin. Les gens savent faire la différence et feront le bon choix pour la planète, bien que ce soit un problème mondial et que nous défendions le fait de ne rien faire.
4) La dépression : Est-ce que l’on a vraiment changé d’époque et sommes nous à ce point ringard?
5) L’acceptation : stade pas encore atteint par la droite (pas sûr qu’elle y arrive un jour)
Aujourd’hui, la majorité des élu-e-s de droite continue de planer en plein mythe des seventies, et défendre le fait, contre la science, le bon-sens[2], et notre futur, qu’il est toujours possible et souhaitable d’arborer sa villa individuelle, avec piscine si possible, une voiture disponible au garage pour sillonner les villes, et en avion passer les frontières avec consommation illimité au buffet de l’hôtel, défendant sans rire qu’il serait interdit d’interdire : s’opposant à l’abaissement des vitesses à 30km/h en Ville, au parcage sauvage des motos sur les trottoirs, et à toutes mesures sérieuses pour lutter contre l’émission de nuisances sonores qui pourrissent la vie à plus de 150’000 habitant-e-s genevoises et genevois, attaquant frontalement le salaire minimum pourtant soutenu à 58% par la population genevois..
Pourtant, quand il s’agit de policer les précaires au nom du fumeux « abus à l’aide sociale » ou de sanctionner les migrants, ces mêmes élu-e-s ne se gênent pas le moins du monde pour piétiner les libertés individuelles et s’en prendre aux droits fondamentaux.
L’interdiction du tabac : qui voudrait revenir en arrière?
Combien d’années nous a-t-il fallu pour en venir à interdire le tabac dans certains lieux, en stopper la valorisation culturelle sur les écrans et dans les films, en prémunir les plus fragiles en empêchant les cigarettiers de faire de la revente devant les écoles ? – Plusieurs décennies de lutte politique et culturelle, des procès en cascade de la part des opposants pour gagner une partie de la bataille- Pourtant, comme pour le droit à l’avortement, le droit à la santé est toujours sujet à des retours en arrière du fait de l’agressivité des réactionnaires.
Aujourd’hui, il ne viendrait l’idée à personne de régresser, et de proclamer que fumer dans les trains, les restaurants ou boîtes de nuit est une liberté importante et que dès 12 ans on peut clopper c’est cool et c’est une chouette « liberté » à défendre au détriment de la santé de la majorité.
Nous sommes aujourd’hui placés face à des multiples enjeux similaires touchant à la mobilité, à l’isolation des bâtiments, aux menaces de multiples formes de pollution, de pénibilité au travail, d’inégalités de genre et de santé. La liste serait trop longue à établir ici. Juste rappeler que l’on se heurte dans chaque domaine aux résistances des adeptes du culte des seventies.
Urgence climatique et urgence sociale sont liés : les plus précaires paient le prix fort
Nous savons très bien que les inégalités sociales et de genre s’accroissent et que l’urgence climatique les accentue. Alors soit nous nous laissons charmer par le mirage d’un utopique retour aux années 70 et mettons la tête dans le sable, soit nous empoignons les défis urgents de notre temps, en les réglant un par un.
Pour cela il faudra dépasser le déni de la droite arque-bouté sur la défense d’intérêt de classe. Son déni à rebours du bon sens fait perdre son temps, son espérance de vie, sa santé et de l’argent à l’écrasante majorité de notre population.
[1]https://www.letemps.ch/opinions/non-ne-vivons-plus-longtemps-bonne-sante
[2]https://www.letemps.ch/opinions/jaime-foot-viande-vitesse-terrasses-peux-vivre-amenagements-genevois