Le virus ou la vie ?

  • 11. mai 2020
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Alors que le coronavirus a débarqué en Suisse et que la décision du Conseil fédéral d’interdire tout rassemblement de plus de 1’000 personnes, fait trembler l’économie et suscite un mouvement de peur diffus, il est important de garder la tête froide, appliquer et faire appliquer les consignes de sécurité. Mais il ne s’agit pas, comme des bandits de grand chemin de dire : « le virus ou la vie » et de paniquer dès qu’un-e voisin-e éternue dans son coude, ou renfile dans sa manche, mais bien d’inclure la possibilité du virus dans nos vies, et tirer rapidement les enseignements politiques de cette crise.

Premier enseignement : avec la déforestation, l’urbanisation et l’industrialisation effrénées nous avons offerts à des microbes des moyens d’arriver jusqu’au corps humain et de s’y adapter. Deuxième enseignement, la crise nous oblige à réfléchir rapidement aux dimensions imbriquées et interdépendante de nos économies, qui les rendent très (trop) fragiles et exposées. Troisième enseignement : elle concerne la manière dont nous nous relions les un-e-s aux autres, et nous comportons socialement les un-e-s envers les autres. Il n’est que voir ces jours la défiance, les mains à demie tendues, les atermoiements pour faire la bise ou non, pour constater combien, socialement, nous ne sommes pas certains de nos liens et de nos appartenances, avons finalement des bases de socialité très fragiles. Et si la vraie peur, était que le vernis civilisationnel ne se fissure. D’ailleurs il est déjà écorché au point que la menace d’un virus réclamant pourtant des mesures simples et de bon sens (se laver les mains, jeter ses mouchoirs, rester chez soi en cas de symptômes) rend notre société littéralement dingue, nos médias mono maniaques, et place nos gouvernements sur pied de guerre.

Le coronavirus, ne s’attrape pas comme l’on éternue

Il ne vous tombe pas dessus au coin de la rue. Il fait partie de notre biotope, et nous devons apprendre à vivre avec. Cet apprentissage de vivre avec va devoir se faire rapidement, car ce n’est pas demain que ces menaces disparaîtront. Et là où nous n’avons pas su collectivement nous discipliner (voyages à outrances, consommation débridée, oubli du bon sens), il semble que le retour de bâton lié à une surexploitation du biotope et un affaiblissement du corps social ne puisse être brutal. Il est pourtant une voie d’évolution possible, celle d’un écosocialisme que la crise actuelle devrait nous inviter à suivre et qui impliquerait frugalité dans nos déplacements, maîtrise des chaînes d’approvisionnement, renforcement de l’agriculture de proximité, durabilité et développement des solidarités de proximité, avec un retour au bon sens, et une mise à distance des réseaux asociaux.

Le salon de l’auto a été annulé, ce qui démontre que ce qui semblait impossible hier peut arriver du jour au lendemain. La voiture individuelle n’est plus un symbole de progrès, mais un objet obsolète et désuet. Du jour au lendemain, ce qui semblait politiquement si dur à obtenir, avec des majorités de droite croyant au toujours au davantage de tout, aux privilèges de quelques uns contre le plus grand nombre, peut être acté. Cela  illustre que les solutions sont politiques et que notre destin collectif est entre nos mains. Mais pourquoi attendre de devoir faire des choix dans l’urgence alors que nous pouvons anticiper ?

Nous n’avons pas à choisir entre le virus ou la vie

Une chaîne de grande distribution annonce que leurs stocks de raviolis en boîte sont épuisés, tout comme le sont les réserves de masque dans les pharmacie, alors que des soignant-e-s en manquent. Le plus grand péril de ce coronavirus n’est pas de l’attraper, mais qu’il nous isole et nous déshumanise avant même de nous atteindre. Égoïsmes, peurs paniques, esprits de fermeture. La pandémie qui guette est celle du repli paranoïaque sur soi.

Alors que nous sommes confrontés au drame des migrant-e-s qui se font d’une manière inhumaine refouler à la frontière grecque, le décalage entre leurs souffrances réelles et nos peurs paniques est abyssal. Des enfants se font gazer et meurent de froid à la frontière grecque. Pendant ce temps, d’autres font des stocks de pâtes ou se ruent aux urgences pour un éternuement.

Nous n’avons pas à choisir entre le virus ou la vie. Par contre nous avons à choisir, et ce choix est chaque jour plus urgent et décisif, entre une société de l’égoïsme et du repli panique, ou une société de l’engagement, de la solidarité et du changement.

Et si on enlevait nos masques plutôt que d’en rajouter?

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