Un peu de courage Monsieur Maudet

  • 03. janvier 2019
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Cher Pierre Maudet,

Je constate que vos affaires, vos mensonges continuent de prendre une place démesurée, dans la presse, dans les conversations des gens, et qu’elles commencent sérieusement à lasser, assurément à agacer, voire créer des conflits entre les citoyen.ne.s.

Vous en êtes pleinement responsable. Vous entretenez de ce fait un climat impropre à la bonne gestion du Canton. Un Conseiller d’Etat doit servir la collectivité, pas la déchirer. Vous avez certes vos groupies; une poignée de ceux-ci vous défendront certainement jusqu’au bout, mais la grande majorité ne vous comprend plus.

Vous pouvez vous barricader, nier une partie de la réalité, vous comportant comme ces militaires assiégés qui s’enferment dans un bunker avec leurs proches, spéculant sur un joyeux renversement de situation. Vous pouvez continuer de croire à une réalité parallèle. Est-ce du courage ? Je ne crois pas.

Je ne suis pas un vautour, je ne crie pas avec les hyènes. Je suis un citoyen lambda, élu député pour une durée limitée, travaillant à côté de cet engagement pour la collectivité, ayant prêté, tout comme vous, serment de servir la République et les institutions. Chaque jour qui passe, nous découvrons le lourd coût pour la collectivité de votre combat personnel.

Le respect que certains pouvaient avoir pour vous s’est étiolé devant ce que vous imposez à la collectivité pour votre propre salut. Votre peau n’intéresse pas les Genevois.es. Nous souhaitons simplement que l’Etat fonctionne d’une manière adéquate et transparente. Menez votre combat de votre côté, laissez la collectivité tranquille. Avec vous au milieu, aujourd’hui, ce n’est plus possible.

Ce n’est pas une élection qui vous a amené au pouvoir, mais un serment pris devant le peuple: votre main levée et une promesse de le servir plutôt que de vous servir et de protéger la République plutôt que de vous en protéger. Il y a une force de ce qui est juré devant la collectivité qui nous lie. Vous avez brisé ce lien.

Comme la presse en a rendu compte, l’ensemble du Grand Conseil a voté ce jeudi soir votre levée d’immunité pour les besoins d’une enquête pénale. Vous êtes désormais soumis à la justice. C’est déjà mieux que d’être entre les mains de vos « amis libanais » qui vous tenaient par les roubignoles et vous ont peut-être fait chanter, sachant tout de votre voyage officiel à Abu Dhabi sur invitation du prince hériter Mohammed ben Zayed Al Nahyane, voyage que vous avez prétendu être privé, au mépris de la vérité, car vous y avez officiellement été invité comme Conseiller d’Etat et que vous avez été payé pour cela. Ce sont des faits, que vous avez finis par reconnaître.

Vos « amis libanais » savaient tout de tous vos petits arrangements et dissimulations en marge de ce voyage sur lequel vous allez maintenant vous expliquer devant la justice. Sur ce point vous n’avez toujours pas pris soin de dire la vérité aux Genevois.es: qu’êtes-vous allé faire là-bas, il y avait-il des contreparties à ce voyage, avez-vous favorisé vos amis, quel était votre deal avec l’ancien président du Conseil d’Etat François Longchamp ? Peut-être avons-nous échappé au pire, mais peut-être le pire est-il encore à venir. Le temps qui passe n’est pas le temps de la normalité. Il est le temps de la suspicion, du trouble et des insondables conséquences de vos mensonges que vous continuez à accroître, encore et encore.

Vous vous accrochez au pouvoir et nous ne savons pas qui vous tient, et nous ne savons pas jusqu’où vos mensonges vous ont rendu servile et redevable.

Certains disent que c’est maintenant à la justice de faire toute la lumière. Certes. Mais c’est aussi à vous, au nom de votre serment de dire enfin la vérité si vous en êtes capables, et c’est à chacun.e de l’exiger de vous. Si vous ne le pouvez pas : démissionnez. La justice doit pouvoir travailler sans que l’un des hommes encore puissant de cette République, ne garde, au bénéfice de son poste, ses réseaux, ses contacts, ses informateurs et moyens de pression au coeur même de l’Etat. Vous ne pouvez prétendre en même temps être Conseiller d’état et prévenu. Ce mélange des genres est intenable et nocif pour la république, destructeur pour la confiance qu’ont encore les gens dans les institutions.

Vous pouvez certes vous accrocher au pouvoir. Vous pouvez même agiter vos troupes pour qu’elles vous laissent entendre que vous êtes irremplaçable. Vous pouvez, seul contre tous refuser la transparence, et la clarté, utiliser vos réseaux pour sauver votre carrière politique. Vous montrez par là clairement le peu de valeur que vous accordez à notre système démocratique.

Vous pouvez être animé par un esprit de revanche et de reconquête. Personne apparemment ne peut vous obliger à changer pour devenir un homme nouveau, ayant fait place nette de ce mélange des genres que vous affectionnez encore aujourd’hui. Vous pouvez mettre vos forces et votre énergie à assurer et organiser votre défense face aux lourdes accusations pénales qui pèsent à votre encontre, plutôt que d’essayer encore de vendre un bilan politique.

Devrons-nous attendre que vous connaissiez votre timing judiciaire et que vous ayez évalué vos chances de rebondir ou pas pour que vous démissionniez ? Un peu de courage Monsieur Maudet, arrêtez de vouloir tout contrôler en entraînant l’Etat dans vos turpitudes.

Le vrai courage, ce n’est pas d’essayer de tirer tout le monde par le bas, pour prétendre que, même à terre, vous maîtrisez encore votre sujet.   

 

Illustration : Patrick Chapatte @LeTemps

 

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