L’échec de la législature cantonale qui se termine aura été celui de la volonté centralisatrice et technocratique du Conseil d’Etat à majorité de droite. Incarnée par un François Longchamp en bout de course dans son Département présidentiel fantôme. Il aura servi, au final, à couper des rubans, essuyer par derrière les maladresses de ses collègues, et tenter de faire bonne figure au moment de rendre les clés du pouvoir. Guère plus.
Un bilan ? Les projets de lois se sont entassés. Pour quels résultats ? Loi sur la police, loi sur la restauration, les débit de boissons, l’hébergement et le divertissement, loi sur la laïcité. Les Genevois-e-s auront savouré durant 5 ans le velouté technocratique et caporaliste du conseil d’Etat. Résultat : plus de cacophonie et d’incompréhension. En rigidifiant le système, en légiférant à bloc plutôt que de chercher des solutions pragmatiques, donner davantage des moyens aux travailleurs, et mettre de l’huile plutôt que du cadre, le Conseil d’Etat a fini par rendre le système plus lourd et moins efficace. Pour une droite qui parle toujours de réformes et d’austérité, quel paradoxe!
La fameuse loi sur la répartition des tâches entre les communes et le canton est un exemple parfait de ce qu’il ne fallait pas faire
Le Conseil d’Etat s’y est engouffré avec un enthousiasme napoléonien. Au final : Berezina. Au nom de la lutte contre les « doublons », d’une idéologie de la « bonne gouvernance », le Conseil d’Etat a cassé des savoir-faire qui fonctionnaient en complémentarité. Et au nom de la clarification d’échelons différents, brisé des relais et des compétences qui se renforçaient.
Le Conseil d’Etat a mis sur un même niveau canton et communes pour les opposer. Cela est contreproductif et a conduit à passer à côté de ce qui a fait la richesse de Genève depuis toujours : la complémentarité des niveaux de décision. Que l’un réalise d’une certaine manière, ce que l’autre parachève, c’est souhaitable, et intelligent. Au diable les étiquettes et la volonté régalienne que tout soit « propre en ordre ». Cette manière hygiénique et maniaque de vouloir délimiter des petites cases pour les remplir, prétendant y caser la réalité est révélateur d’une idéologie carrée qui aurait davantage dû inspirer le Conseil d’Etat à gérer une entreprise de lego, plutôt que de conduire l’Etat pour 5 ans de plus.
Un gros problème d’humanité
Ce gouvernement a traité les humains comme des pièces, en faisant sauter des travailleurs comme des fusibles, et payer les lampistes (Affaire Adeline, renvoi de Christian Cudré-Mauroux, la trentaine de bagagistes virés de l’aéroport par P.Maudet. etc.,), mettant toujours celles et ceux qui sont en bas de l’échelle sous pression pour que d’autres conservent leur poste ou bonne figure.
Ce Conseil d’Etat a failli, parce qu’il a tellement cru dans l’idéologie des petites boîtes qu’il en est devenu une lui-même, pas très subtile et reproduisant les mêmes erreurs, en fonctionnant sur un même logiciel, manquant d’âme et d’engagement, proposant de gérer Genève à coup de normes plutôt que de négociations et pragmatisme.
Assez de technocratisme !
1) Assez des lois inutiles qui, plutôt qu’encadrer une réalité sociale complexe, la rendent plus nouée. Assez de technocratisme et de rigidités idéologiques qui se font sur le dos de la république mais en son nom, et qui, au nom d’appliquer les mêmes lois pour toutes et tous, inventent des textes inapplicables en regard de la réalité du terrain, constituant de nouvelles inégalités.
Au final, les plus fragiles ou trop honnêtes sont punis. Soit parce que l’Etat les a sous la main, soit parce qu’ils ne sont pas assez organisés pour se défendre, ou parce que l’usure et la fatigue fait son travail. L’Etat alors cognera encore sur eux, prétendant que la lassitude de se défendre et l’abandon de la bagarre est un signe de manque d’adaptabilité et de sveltesse. A l’iniquité de mauvaises lois sera rajouté alors la punition de les avoir subies de plein fouet.
2) Assez du désengagement de l’Etat au profit des bénévoles et des associations sans moyens supplémentaires. Par exemple dans le domaine des assurances sociales, les gens sont découragés d’exercer leurs droits, et parfois volontairement maintenus dans l’ignorance. Les pauvres sont fliquées, et la chasse aux précaires est organisée (loi contre la mendicité). Monsieur Poggia n’a fait pas son travail jusqu’au bout. Il a laissé des « dossiers » être ventilés ici et là parce que les travailleurs sociaux n’ont plus les moyens de les gérer. La « subsidiarité » voulue au profit des associations devient un mot vertueux pour une sale pratique, celle de dire « bon débarras » de la part de l’Etat en direction du monde associatif fonctionnant d’une manière bénévole usante en regard des charges imposées.
2) Assez de traiter les gens comme des ressources inertes, des fusibles que l’on fait sauter, pour un oui ou un non. Ce conseil d’Etat est en échec, parce qu’il a oublié de travailler avec les gens et pour les gens, se souciant avant tout de sauver son arrière train, sans panache ni courage. On ne fait pas de politique avec le trouillomètre à zéro, juste pour éviter de se faire des ennemis ou pour finir conseiller fédéral en slalomant médiatiquement et méthodiquement en direction de Berne. Cette manière-là de fonctionner, c’est toujours sur le dos des citoyen.ne.s qu’elle se fait.
3) Assez d’un Etat déconnecté du terrain. Sans les communes, l’Etat n’est rien. Sans la proximité du local, sans le travail et la connaissance des réseaux locaux, les décrets et les grands plans quinquennaux, les belles déclarations de principe et le projet de traversée du lac à 5 milliards pour 2060 si tout va bien, c’est juste du vent ou de la com’ opportuniste. Il s’agit de renforcer le pouvoir des communes, le pouvoir des travailleuses et travailleurs de proximité, d’accentuer les collaborations et transversalité avec l’Etat. Le temps des silos a vécu, le temps des mammouths est fini depuis longtemps. Il est temps de changer de manière de faire. Et pour cela, renverser la double majorité de droite (Conseil d’Etat et Grand Conseil).
A gauche !
Ce conseil d’Etat à dominance de droite a vécu. Il a eu sa chance. Il a échoué. Renversons-le à gauche, pour changer de majorité et de méthode, afin que le nouveau Conseil d’Etat travaille enfin de manière véritablement concertée, collégiale, pour les genevois.e.s, et pour le bien public!
[1] https://www.humanrights.ch/fr/droits-humains-suisse/inter…