Cyclistes, bas les pattes ?

  • 25. juillet 2017
  • air du temps
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C’est quand même épatant que la police municipale de la Ville de Genève, ressortant ses vélos qu’elle avait rangés au garage durant l’hiver dans l’attente de la belle saison, se mette en piste pour chasser prioritairement les cyclistes. Pas plus tard qu’avant hier, alors que je circulais au ralenti dans un joli parc de la ville, sans âme qui vive ni piéton proche de moi, arrivent trois pandores à vélo qui m’intiment de ranger mon téléphone que j’avais posé sur mon oreille pour écouter mes messages.

Ils étaient fiers, ils étaient sûrs de leur bon droit les pandores municipaux. Ils me sont tombés dessus, comme je ne les ai jamais vu faire avec un automobiliste téléphonant au volant, avec une volonté claire de me faire ranger mon téléphone dans ma poche.

Or, nous avions bien posé une fois la question au conseil municipal pour savoir pourquoi il y avait si peu de dénonciation d’automobilistes utilisant leur téléphone au volant. La réponse d’un gradé de la police municipale faisait peur : c’est parce qu’il est difficile de les saisir sur le fait. Sous-entendu : les municipaux à vélo ciblent les cyclistes plutôt que les automobilistes parce que c’est plus simple. La loi n’est donc pas la même pour toutes et tous. Elle est uniquement appliquée en fonction de l’opportunité de cibler les contrevenants. Cela s’appelle l’arbitraire. Les automobilistes qui téléphonent au volant risquent de tuer des gens. Les cyclistes qui conduisent d’une main en écoutant leurs message, se casser leur figure uniquement. Les rails de trams sont mille fois plus dangereux pour les cyclistes que leur téléphone. Et si les policiers municipaux chassaient plutôt ceux qui enfreignent la loi que ceux qui roulent à vélo ?

Là où cela se corse encore, c’est que le policier qui me demandait de ranger mon téléphone connaissait mal la loi. Comme le rappel un article de la Tribune de Genève du 22 octobre 2012[1], ainsi que le service Interroge de la Ville de Genève : » il n’y a pas d’articles qui interdise spécifiquement de téléphoner à vélo », informe Guido Bielmann, porte-parole de l’office fédérale des routes (OFROU). Or, à défaut, c’est l’alinéa 3 de l’article sur la conduite du véhicule qui est utilisée pour sanctionner les cyclistes : « Les conducteurs de véhicule automobiles, de cyclomoteurs et de cycles, ne lâcheront pas l’appareil de direction ». Bref, il faudrait, selon cette interprétation de la loi, que le cycliste aie toujours un contact avec son guidon (mais une main, deux mains?). Cela semble être une interprétation très extensive de la loi. Beaucoup de cyclistes conduisent momentanément d’une main durant leur journée. Mais surtout : comment alors indiquer des changements de direction  ?

Conformément à l’ordonnance sur la circulation routière (OCR), article 3 alinéa 3, « les cyclistes ne doivent lâcher ni le guidon ni les pédales, sauf pour indiquer un changement de direction. Ils doivent en outre vouer leur attention à la route et à la circulation, sans se laisser distraire. »

Bref, un cycliste peut bien lâcher son guidon (et donc se mettre en danger) quand il est dans le trafic, car il n’a pas d’autre choix, vu que les infrastructures routières sont construites pour les véhicules motorisés avant tout.

Alors, si un cycliste n’est pas amendé quand il indique changer de direction, ne devrait-il pas l’être aussi quand il se passe la main dans les cheveux, quand il mange une glace, se passe du labello sur les lèvres, quand il lève la main pour saluer un ami, quand il lève le poing pour exprimer sa colère envers un véhicule qui l’a tassé contre le trottoir, ou ne respectant pas le mètre cinquante recommandé pour le dépasser, quand il réajuste sa veste, quand elle réajuste sa robe pendant qu’on y est ? Selon cette interprétation de la loi, oui. Haro sur les cyclistes donc, qu’ils mettent bas les pattes sur leurs guidons.

Pour conclure, avis aux policiers municipaux qui s’acharnent sur ce qui semble à leur portée plutôt que de combattre les véritables risques mortels de la circulation -c’est-à-dire, les comportements des automobilistes envers les usagers les plus vulnérables- ; que l’on ne vous voie pas parler en radio à vos collègues, réajuster votre casque, ou indiquer de la main une direction quelconque, sinon, en effet miroir, on dégainera nos téléphones pour vous prendre en photo, pour rire (jaune) de votre partialité et sélectivité dans les délits qui conduisent à pointer du doigt des contrevenants mineurs et des usagers vulnérables plutôt que de lutter contre les vraies causes d’insécurité.

 

[1]www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/Il-telephone-a-velo-et-e…

[2] http://www.ville-geneve.ch/index.php?id=16358&id_deta…

 

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