Il ne faut pas tourner la page

  • 21. février 2017
  • air du temps
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Ce samedi 31 décembre, fredonner la chanson de Nougaro serait bien approprié. Pourtant, non, on ne veut pas tourner la page, ni changer de paysage. On rechigne à faire comme si, par magie et dans les pétarades du soir, les fulgurances des cotillons, cette année écoulée magiquement se dissiperai… et hop les compteurs seraient remis à zéro pour repartir du bon pied? Non.

Il n’y a pas de grâce présidentielle pour l’année écoulée. Elle s’empile à la précédente qui s’empile à la précédente qui s’appuie sur un héritage qui se cumule. La magie du nouvel an est une crémeuse fumisterie. Rien n’est classé, liquidé, résilié. Non, de cette année 2016 nous ne serons pas quittes à minuit.

 

Dimanche 1e janvier : 366e jour de l’année 

On va s’y efforcer quand même? Faire sauter quelques bouchons, valser les bouteilles, trinquer, guincher, s’alka-seltzeriser? Et s’embrasser? S’embrasser, oui! Il nous faudra encore bien quelques jours pour ne pas dater de 2016 les premiers courriers de l’année. Mais enfin, si on y réfléchit, qui écrit encore des courriers aujourd’hui, et les date même ? Les courriels ont une mise à jour automatique, plus besoin de les dater, de remonter les pendules, de retourner les clepsydres, secouer les coucous. La machine se charge elle-même de se remettre à jour. Nous allons avec le mouvement, et n’avons pas avancé depuis les grecs : le champagne que nous buvons le soir du 31 est-il toujours le même ou chaque fois différent ? Héraclite a la gueule de bois.

Le compte à rebours : ultime ringardise

Le domaine commun, aujourd’hui, c’est le changement, la fulgurance, le dépassement de soi. Le 31 décembre est devenu la fête la plus lente qui soit, la seule qui fait du temps son unique enjeu et ne célèbre que son passage dans une période où la fuite en avant est continue.

Or, quand le temps n’est plus qu’à la course, à quoi bon célébrer encore l’accélération? Le 31 se voudrait la fête du dépassement, elle devient paradoxalement celle du ralentissement, de la rétrospective, voire de la nostalgie; le seul moment de l’année où l’on fait encore un compte à rebours de 10 à zéro pour sourire béatement sur un zéro qu’on voudrait prolonger à l’infini. Alors qu’on ne fait même plus de compte à rebours pour envoyer des satellites dans l’espace, on continue à faire le compte à rebours pour les cotillons. Beau.

 

Le temps n’est pas à la fête 

Pas de jour de repos, pas de trêve, pas de vieux cahier des charges à jeter, même plus d’agenda à changer, la mise à jour se met automatiquement à jour sur le smartphone.

Pas de silence à faire, tout continue comme avant, rien de neuf et de nouveau. Plus de résolutions, d’ailleurs, on y croit plus vraiment. A peine un nouvel abonnement de fitness à offrir, histoire d’y aller pour 3 semaines, on verra pour la suite… un promesse d’arrêter de fumer? ça devrait tenir les 3 premiers mois, après on se remettra à torailler.

Non, il ne faut pas tourner la page, rien ne change vraiment le 31 décembre, mais quel joli prétexte pour festoyer un peu quand même.

Il n’y a plus rien à fêter le 31. Mais avec un brin de distraction, on passe même à la nouvelle année sans s’en rendre compte. Hommage à ceux qui bossent ce soir, et ceux qui se couchent à 22h après un repas sommaire, réveillonnent avec une bande-dessinée.  Et à ceux qui s’embrassent, malgré tout, toujours!

 

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