Des personnes sont donc allées cagoulées et en groupe menacer des individus lors d’un débat à l’université de Genève le 21 décembre, cherchant à puriner et entarter une conseillère nationale. Ils ont ensuite revendiqué leur « fait d’arme » dans un communiqué navrant affirmant que si cette fois-ci ça n’avait pas exactement marché comme prévu (ils se sont fait bloquer manu-militari), la prochaine fois, ça ne se passera pas de la même manière. Faisant promesse qu’ils seront cette fois plus nombreux, mieux organisés et prêts à en découdre afin que Genève reste libre des fascistes. Tout cela dans un anonymat absolu, à la manière des trolls des réseaux sociaux.
Leur tribunal autocratique avait tranché : cette conférence abritait une fasciste. Ils avaient donc le droit de la faire sauter et d’en azorer tout occupant au purin. Mener la guérilla contre les « fascistes » les légitime à leurs propres yeux et les autorise à imposer leurs vues. Ne s’encombrant ni de nuance ni de réflexion, ils font démonstration de leur ignorance historique, confondant fascisme et extrême droite locale, ne voyant pas qu’avec leurs cagoules et strabismes d’échelles, ils en renforcent l’audience.
Je suis à des années lumières des idées et positions de cette conseillère nationale. Cela ne change rien au fait qu’il faut condamner son agression et rappeler que c’est avant tout par l’argumentation que le caractère erroné de ses prises de positions doit être démontré ; et par les urnes son volume d’audience scellé. En faire une victime de l’intolérance c’est accomplir le contraire. S’attaquer physiquement à sa personne plutôt qu’à ses idées, c’est renforcer celles-ci par le traitement violent de celle-là. En démocratie, il existe une inépuisable possibilité de dialogue, de débat, de contestation. Nous disposons de droits politiques étendus, avec des possibilités florissantes de voter, d’élire, de lancer des initiatives, des referendums, etc. Mais aussi de manifester pacifiquement, de boycotter, etc. Cela donne un poids fondamental à chaque citoyenne et citoyen.
Malheureusement un calcul binaire est à l’œuvre chez les cagoulés. Leur gymnastique rappelle davantage l’inquisition théologique que l’élan révolutionnaire du temps des cerises. Voulant faire la démonstration du bien contre le mal, du pur contre l’impur, du noir contre le blanc, de l’antifascisme contre le fascisme, ils sont conduits hors-sol à l’aporie.
Ces agissements antidémocratiques valorisant l’agression sont inacceptables. On ne combat pas l’extrême-droite en singeant son comportement. Que des groupuscules croient que c’est avec des cagoules et par la violence, par l’intimidation que notre société évoluera est navrant. Les extrêmes se nourrissent l’une de l’autre. Il est fondamental que nous nous engagions pour défendre et investir nos institutions, que nos lieux de débats soient respectés et protégés ; que le bien commun, la richesse du dialogue, ne tombent jamais en possession des extrêmes. Notre démocratie n’a pas besoin de cagoules.