Ça alors, mais quelle surprise !
Les super riches continuent d’affluer à Genève[1] alors que la droite nous martèle bouche en cœur larme à l’œil que Genève est un terrrible ‘enfer fiscal’!
Il n’y a donc aucuns vœux pieux à formuler pour 2023 mais une volonté nette à concrétiser, celle d’établir la justice fiscale et sociale dans une société inégalitaire où ceux qui ont trop ont toujours plus et ceux qui ont peu toujours moins. Aucuns voeux
Bon passage à l’an nouveau, que cette année soit pleine de joie, de solidarités et de luttes… mais surtout lourde d’une soif de justice contagieuse et d’un esprit révolutionnaire.
2023 : fin des rois !
Dans un article du journal Le Temps daté de 2016 intitulé « A Genève, la chasse aux déclarations fiscales erronées rapporte 600 millions de francs »[2] on apprenait qu’entre 50% et 60% des déclarations fiscales des contribuables genevois étaient retouchées par l’administration. Ces contrôles permettaient à l’État de Genève de récupérer près de 600 millions de francs chaque année ! Analyse de l’époque : « La charge de travail pesant sur les 500 employés de l’AFC – lesquels gèrent plus de 6,5 milliards de francs de recettes fiscales – augmente chaque année. Le nombre d’assujettissements a progressé annuellement de quelque 3%, soit quelque 13 000 dossiers supplémentaires, alors que le nombre de collaborateurs est resté le même. Conséquences : on contrôle moins ! » Les choses ne semblent malheureusement pas s’être améliorées. L’affaire Castel a très récemment défrayé la chronique.[3] Le journal Le Temps nous apprend que « Pendant plus de dix ans, l’autorité n’a pas compris que Pierre Castel, propriétaire du groupe Castel, remplissait sa déclaration sous son deuxième prénom, devenant Jesus Castel. Installé à Genève entre 1982 et 2012, le nonagénaire s’est, semble-t-il, affranchi d’une grande partie de ses obligations fiscales, avant de s’établir en Valais. En juillet dernier, la Chambre administrative de la Cour de justice a confirmé un redressement fiscal de près de 410 millions de francs ! Les recettes pourraient être encore plus importantes, puisque ces suppléments d’impôt, intérêts et amendes ne portent que sur les années 2007 à 2009 – Pierre Castel accepte le montant fixé pour 2009, mais conteste devant le Tribunal fédéral ceux retenus pour 2007 et 2008. L’AFC a ouvert une seconde procédure sur ses déclarations de 2010 et 2011. En revanche, les années antérieures sont perdues, du fait de la prescription qui est de dix ans. Ce n’est qu’en 2017 que l’AFC a commencé à faire preuve de curiosité envers ce contribuable ne déclarant que 1,3 million de revenus et 19,9 millions de fortune en 2007. Pour ce même exercice fiscal, son patrimoine a été réévalué à 3,3 milliards de francs – 170 fois la somme déclarée ! » Pour rappel, les revenus fiscaux s’élèvent à 7’709 millions dans le projet de budget 2023, soit une augmentation de 202 millions (+2.7%) par rapport au budget 2022.
J’en ai profité pour poser les questions suivante au Conseil d’État:
- En 2016, selon l’article du journal Le Temps cité, les corrections opérées par l’AFC atteignaient 600 millions annuellement s’agissant des personnes physiques, des personnes morales, des indépendants et des promoteurs-représentants de commerce – quel est le montant précis pour l’année 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 ?
- Le terme correction signifie-t-il simplement la différence entre ce qui a été déclaré et ce qui est dû ou cela inclut-il d’éventuelles amendes ?
- Si non, quel est précisément le montant annuel des amendes perçues pour l’année 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 en plus des corrections ?
- Quelle est précisément la part des personnes physiques et morales touchées par ces corrections ; quels sont les secteurs et barèmes de revenus principalement touchés par ces corrections ?
- La Conseillère d’État en charge des finances s’est plu à incriminer une crise des charges de l’État et non une crise des revenus lors du vote du budget 2023. Quelle est l’estimation, en centaines de millions, des revenus perdus pour la collectivité chaque année -de la même manière que dans la gestion du cas Castel – par manque de contrôles, contrôles tardifs, ou de coordination entre les services de l’AFC ?
- Dans l’affaire Castel mentionnée, il a été démontré que la coordination entre services a failli ; que le service de taxation des personnes morales ne se coordonnait pas avec le service de taxation des personnes physiques et que de nombreuses années de rattrapage d’impôt ont été de ce fait inutilement perdues. Quelles sont les mesures qui ont été prises par le Conseil d’État afin de dépasser le fonctionnement en silo de l’AFC et éviter que des centaines de millions de francs ne soient perdus pour la collectivité ?
« Instruisez-vous, parce que nous aurons besoin de toute votre intelligence.
Agitez-vous, parce que nous aurons besoin de tout notre enthousiasme.
Organisez-vous, parce que nous aurons besoin de toute notre force. »
Antonio Gramsci dans l’Ordine Nuovo, 1er mai 1919.
[1] https://www.tdg.ch/des-familles-fortunees-quittent-londres-pour-geneve-714510997926?fbclid=IwAR0hSSJ2geyFrXE6NkYEz3GOCH6O18Nwn3nvZ58aI-rguSDcNdDDt9Tkowo
[2] https://www.letemps.ch/suisse/geneve-chasse-aux-declarations-fiscales-erronees-rapporte-600-millions-francs
[3] https://www.letemps.ch/suisse/geneve-messie-pourrait-absorber-deficit-letat-se-nomme-pierre-non-jesus