Si seulement
il y avait
épidémie de charité
une simple
contagion de bonté
S’il y avait
une
féroce attaque de générosité, jusqu’aux gènes
À l’adn même : un virus dans la moelle
si l’entraide avait
un R+1 croissant follement
et moins et toujours moins d’anticorps
plus du tout traces de barrières
fondements meubles comme du savon
avec une exponentialité astronomique l’empathie
à faire frissonner bourses, peurs, griffes, insécurités
un vaccin à la haine : quelques bonnes suggestions de lecture
fin de l’opposition entre les pillules et Platon
pharmacopée : Char, Weil et quelques comptines
pour tout kit de survie l’enfance
Et si
on s’en sortait toutes et tous
sans laisser personne à la traîne
ensemble?
Si seulement
ceux qui gueulent liberté liberté liberté en troupeaux
comme s’ils avaient idée de ce que cela pouvait être
la liberté
le désir brut presque bête
c’est à dire vital
de la quête douloureuse, du doute de ce que liberté peut être
et en quoi elle lie justement absolument
injustement
à l’autre
ne portant nécessairement pas sur sa propre personne
précisément pas du tout
sur les enflures démesurées de je et du moi je
encore
mais
précisément
non justement, pas moi, non
la liberté :
toi d’abord!
une simple silencieuse et radicale
peste de charité
glissée de bouche en bouche
de bouche à oreille
qui emportera, pernicieuse implacable triomphante
d’un joyeux souffle, d’une invisible toux
la parole de l’une, le silence de l’autre
les retenues de toutes et tous.
………
Dessin : Paul Ghidoni