Rasons les voitures que l’on voie la ville

  • 26. juin 2022
  • air du temps
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Dans les années 80, une expression surgissant entre Lausanne et Genève disait tout du désir d’émancipation d’une jeunesse étouffant : Rasez les Alpes que l’on voie la mer. Aujourd’hui, les habitant-e-s des villes disent: rasons les voitures, que l’on voie la ville.

Parce que l’on n’en peut plus, des autoroutes urbaines, du volume pris par ces boîtes de métal aux agressives accélérations, de leurs pets méphitiques, trajectoires écrasantes, de leurs excès continus des vitesses, des atteintes à la santé et à la vie des plus fragiles qu’elles occasionnent, sur les routes et leurs bordures.

Chaque année apporte son lot d’aînés, de piétons, de cyclistes abimés ou tués. Mais si tous ne meurent pas, les autres sont terrorisés, ayant intériorisé la menace au coeur de leur quotidien, comme si cela était normal.

La phrase la plus prononcé par un parent à son enfant est : Attention à la route, reviens, tiens-moi la main.  Impossible de laisser 5 mètres de distance à ses gamins ou jouer dans la rue; d’éviter que les aînés soient contraints à des détours épuisants pour emprunter un maigre passage piéton où ils ne seront même pas sûr d’être en sécurité. Et si un sémaphore en règle le passage, ils seront contraints de presser le pas pour, chronomètre en main, avoir juste le temps d’arriver sur l’autre rive, avant que le flot rugissant ne balaie tout sur son passage.

Marre du Moloch.

 

Littéralement, la voiture empoisonne la ville, la vie. Impossible de marcher tranquillement, la cité est colonisée par ces machines d’un autre temps. A Genève, plus qu’ailleurs, une majorité de droite anachronique défend chaque pouce de bitume, surface volée aux habitant-e-s, et refuse toute restitution.  Et si un trou à Tolochenaz coupe Genève du reste de la Suisse, c’est bien parceque durant des décennies, les mêmes ont défendu la route contre le rail, jusqu’à ce que le retard soit abyssal.

L’espace urbain est colonisé par des automobilistes qui invoquent la liberté de se déplacer à leur guise  à leur rythme pour contraindre les autres à vivre sous leur menace, et ce jusque dans l’intimité de leurs appartements où leur sommeil. Les particules fines (PM) font partie des polluants cancérigènes, les oxydes d’azote, ozone, dioxyde de carbone rejetés par les véhicules thermiques aggravent les crises des asthmatiques, altèrent le développement des capacités pulmonaires des jeunes enfant, tuent. Sans parler des microparticules de plastiques, résultant du frottement des pneus sur le bitume, contribuant à la  pollution de l’air et des eaux, par ruissellement.

Comment se débarrasser de la bagnole, cette vieille manie devenue addiction après la lune des miel des années 50? – La traiter comme un cancer, en retirer les tumeurs, opérer sur les artères. Libérer le corps urbain de ces métastases faites de parkings, de bretelles autoroutières, de viaducs, de tunnels et autres bunkérisations. Les cellules malades que sont les bagnoles se reproduisent sans fin quand on leur donne de la place. Elles en ont en excès sur un territoire exigu comme le notre. Opérer est douloureux ? Ne rien faire c’est se condamner à mourir à petits feux les bronches bouffées par les particules fines.

Aujourd’hui, comme le drogué va à sa seringue, l’automobiliste sollicite son dealer et sa pompe à la station service. Et à chaque centime versé s’enrichissent les pétromonarchies tyranniques du golf persique.

La bagnole est une aberration économique, écologique, sanitaire et politique.

Marre du Moloch.

Rasons les voitures que l’on voie la ville.

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