La raison de l’explosion de violences en Israël et dans les territoire occupés? La poursuite de la colonisation et de l’état d’apartheid. Le déclencheur ? À Sheik Jarrah, à Jérusalem-Est, la spoliation des maisons de huit familles au total, soit 78 personnes dont 28 enfants menacés d’expulsion de leurs propriétés dans lesquelles elles vivent depuis plus d’un demi-siècle. Et boum : c’est l’escalade.
Il ne s’agit en aucun cas d’opposer un peuple à un autre, mais de dénoncer clairement l’agression d’un État dirigé par une coalition d’extrême droite perpétuant l’occupation de territoires appartenant à d’autres, grignotant de nouveaux territoires par de nouvelles colonisations, renforçant un état d’apartheid et perpétuant de multiples violations des droits humains dans l’immense silence de la communauté internationale.
Comme le rappelle Human Rights Watch dans un rapport du mois d’avril dernier{1}, les crimes contre l’humanité doivent maintenant conduire à l’action pour mettre fin à la répression des Palestiniens.
Il n’y a pas d’équilibre entre les forces en présence, ni de symétrie dans ce conflit. Des jeunes manifestent dans le monde entier en criant « Palestinian lives Matter » en écho au « Black lives Matter » et ils ont raison. C’est bien le droit de vivre en tant qu’être humain, La défense de droits fondamentaux qui est en jeu. Cela nous concerne toutes et tous. Il n’y a pas de races ou de groupe ethnique qui soit inférieur à un autre.
Des voix s’élèvent pourtant pour dire : ‘ce n’est pas votre affaire, taisez-vous’ ou: ‘si vous ne dénoncez pas systématiquement tous les conflits, bouclez-là sur celui-ci’. En plus, bien sûr, des récurrentes accusation d’antisémitisme qui jaillissent dès qu’il s’agit de remettre en question la politique d’extrême droite de Benjamin Netanyahou et de sa sinistre coalition. Ne nous laissons pas intimider par ces critiques ni pas celles et ceux qui voudraient nous faire croire que les torts sont également partagés, qu’il y a une sorte d’égalité de la terreur, et voudraient confortablement, grâce à l’épouvantail du Hamas, renvoyer au nom de « la paix », les un-e-s sur leurs plages au soleil et les autres dans leurs camps de réfugiés, leurs prisons, afin que le nettoyage ethnique des Palestiniens puisse tranquillement continuer. Nous refusons l’endormissement des consciences ou la lâcheté du regard détourné. Plus écœurant que le bruit des bottes là-bas, il y a le silence des pantoufles ici. Un cessez le feu n’est pas un retour à la paix. Il n’y aura jamais de paix tant qu’il y aura colonisation et apartheid. Ceux qui parlent ‘de la paix’ oublient un peu vite que Netanyahou était celui qui appelait à la mort directe d’Yitzakh Rabin et qu’il est le fossoyeur de tout effort de paix. L’un des principaux responsables de la situation actuelle.
La récente position de B’Tselem publié dans le journal israélien Haaretz est à lire. Cette position de juifs progressistes et défenseurs des droits humains en Israël identifie avec justesse le noeud du problème.{2} Pour B’Tselem: « Les violences actuelles ayant cours en Israël et Palestine sont une conséquence d’une régime d’apartheid qui contrôle la région entière. Sous ce régime, la moitié de la population qui vit entre le Jourdain et la mer Méditerranée peuvent vivre une vie pleine et entière et jouir de la protection de leurs droits humains, parce qu’ils sont juifs. L’autre moitié, des palestiniens, ne le peuvent pas. La violences urbaine que nous constatons ces derniers jours est déplorable, terrifiante, et doit être condamnée avec force. Toute violence contre les civils est totalement répréhensible. Cependant la violence coule plus profondément que ce que peuvent capter les caméras. Le spectre des mesures que le régime Israélien emploie afin d’assurer une suprématie juive est intrinsèquement violente. Frappes aériennes, grenades à main sont des éléments visibles, alors que les lois, les ordres militaires, la bureaucratie, les faiseurs de lois et juges qui soutiennent le régime demeurent grandement invisibles. Restaurer l’ordre voudrait dire que les Juifs retourneront à leur vie pacifique pendant que les Palestiniens continueront à vivre sous une botte : sujets à de constantes, incessantes violences qui demeurent invisibles. Une réalité basée sur une violence organisées n’est pas seulement immorale, elle est une danger pour nous toutes et tous. C’est pourquoi la Déclaration universelle des droits de l’homme proclame en 1948 dans son préambule : « Il est essentiel que les droits de l’homme soient protégés par un régime de droit pour que l’homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l’oppression »{3}. Nous avons toutes et tous le droit de vivre dans un régime qui assure justice, droits et devoir pour les deux peuples. Un régime qui donne à chacun-e vivant ici le droit de vivre, le droit à la sécurité, et la liberté de créer, apprendre, rêver et aimer. Nous désirons toutes et tous la vie. Pour chacun-e d’entre nous. »
Toutes celles et ceux qui ont pu aller dans les territoires occupés en conviennent. Les Palestiniens vivent sous l’asphyxiante botte de la domination et l’emprise d’une armée d’occupation. Ayant pu aller à Hebron à Naplouse ou à Jérusalem-Est, au camp d’Arroub où vivent 10’000 personnes sur 200 mètres carrés avec deux écoles pour les gamins et des check points tout autour, j’ai pu voir la violence quotidienne, les humiliations s’exerçant contre un peuple aux perspectives bouchées. Aux mur des maisons en préfabriqué, depuis 73 ans, les clés des maisons spoliées, celles de réfugié-e-s qui espèrent un jour retourner chez eux, dans le respect du droit international.
La plus grande menace pour la paix et l’avenir d’Israël c’est l’extrême droite Israélienne et les mouvements d’extrémistes messianiques sionistes qui ne valent pas mieux que le Hamas. Omettre cela, c’est cautionner la politique de colonisation et d’apartheid et donner un blanc seing à la poursuite des exactions.
Alors, on fait quoi ? On s’engage ici, on manifeste, dénonce et renforce les liens de solidarité en sortant de l’indifférence, en mettant la pression sur nos gouvernements afin que cesse la politique collaborationniste et complices de la Suisse en faveur de l’Etat d’Israël.
Pour rappel, la Suisse a acheté des drones israéliens Elbit{4} testé sur la bande de Gaza. Notre Conseiller fédéral en charge des affaires étrangères Monsieur Cassis est un fervent soutien de la poursuite de la colonisation, puisqu’il considérait l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) comme partie du problème, et non de la solution.{5} Tant qu’il y aura la poursuite d’investissements, d’achats et de vente d’arme avec un État qui pratique le terrorisme, rien ne changera.
{1}https://www.hrw.org/news/2021/04/27/abusive-israeli-policies-constitute-crimes-apartheid-persecution
{2}https://threadreaderapp.com/thread/1393097857746485248.html
{3}https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/
{4}https://www.letemps.ch/suisse/lachat-drones-israeliens-souleve-toujours-davantage-questions
{5}https://www.rts.ch/play/tv/temps-present/video/isral-palestine-un-suisse-dans-la-tourmente?urn=urn:rts:video:11834413