Tout le monde perçoit bien les limites actuelles de l’exercice du semi-confinement. L’hiver est éreintant, on n’en peut plus, la sortie du tunnel pointe avec l’arrivée des vaccins, alors les beaux jours et ce petit air de printemps poussent tout le monde dehors, musées et cafés demeurant fermés.
Où aller en famille quand on n’en peut plus d’être chez soi ou quand le chez soi est déjà devenu son bureau ou son ermitage ? Alors ça se bouscule sur la plage, ça se ramasse dans les parcs. On voit s’aggraver le risque de discriminations avec des amendes qui tombent quand un groupe de jeunes se réunit à 10 dans un préau le soir, mais les attroupements massifs diurnes sont épargnés. La loi du nombre rendant toute intervention plus délicate.
Le fantastique succès de la plage des Eaux-Vives laisse augurer d’un été délicat. Après des mois d’isolement et d’observance de la distanciation sociale, il y a quelque chose de presque choquant dans ces grands attroupements, mais aussi de très naturel. De nombreuses personnes n’en peuvent plus et se ruent dehors. Comment anticiper et accompagner ce mouvement ?
La plage des Eaux-Vives risque bien, comme les bains des Pâquis, de devenir un espace si fréquenté et dense qu’avec le réchauffement de l’air et de l’eau, des milliers de personnes iront chercher un accès à l’eau. D’un côté, on risque d’avoir les théâtres et les restaurants fermés et de l’autre des barbecues géants ; des baigneurs et baigneuses serré·es comme des sardines. Cela serait évidemment perçu, et avec raison, comme une incongruité.
Il est donc urgent d’ouvrir sur la rive droite d’autres accès à l’eau. Un projet existe le long du quai Wilson, sa réalisation doit être accélérée. Des proxy-sport et installations temporaires pour faire de l’exercice à l’extérieur pourraient astucieusement être mis en place ; enfin, des espaces récupérés sur le trafic automobile pourraient permettre de piétonniser temporairement des quartiers et offrir ainsi des espaces de respiration aux habitant·es.
La pandémie nous invite à utiliser autrement et mieux l’espace public. Celui-ci doit être rendu plus accessible, et les espaces dévolus aux habitant·es agrandis. Si cela n’est pas fait, le risque est grand que la population ne se retrouve à se presser et se serrer telle des sardines au bord du lac.
En pleine pandémie, nos autorités, comme elles nous y ont déjà habituées, imposeront alors dans l’urgence des fermetures, réduisant encore d’autant les espaces disponibles, avec tous les risques corrélés pour la santé, mentale et physique de nos concitoyen·nes. Le printemps s’annonce chaud. Il nous faut l’anticiper.