L’UDC agite la burka devant nos yeux, et lutte en même temps contre l’égalité femme-homme en Suisse. L’Islam devient de fait un bouc émissaire facile. Ne tombons pas dans ce piège. Que l’on soit homme ou femme, s’opposer à cette initiative sexiste, raciste et stigmatisante de l’UDC est légitime.
Il est évidemment inacceptable de forcer une personne de s’habiller de telle ou telle manière, tout le monde s’y accorde. Pour rappel, le code pénal suisse sanctionne déjà les menaces (art.180) et la contrainte (art.181) et les poursuit d’office. Les femmes du golfe venant en villégiature en Suisse mettront un foulard et un masque chirurgical en descendant de l’avion si l’initiative est acceptée. C’est cela le progrès pour l’égalité ? Cette initiative en trompe-l’oeil ne changera rien à la réalité d’une seule femme dans notre pays.
Le port du voile intégral peut résulter d’un libre choix, comme c’est le cas par exemple de ressortissantes suisses qui se convertissent ; ou des pleureuse de Romont. Masques, voiles, foulards, écharpes : depuis la nuit des temps les visages des femmes et des hommes se couvrent et se découvrent. Le voile qui donne lieu à tant de polémiques fait partie de notre tradition occidentale depuis l’Antiquité.
Parmi celles et ceux qui soutiennent cette initiative, certain-e-s pensent sincèrement ‘libérer les femmes’ ou ‘lever le voile de l’oppression’. Dans les faits, elle en renfonceront plus certainement un certain nombre dans l’enfer d’un huis-clos domestique. Sandrine Ruiz, présidente de l’Union vaudoise des associations musulmanes (Uvam) qui représente 17 structures et quelque 3000 membres et sympathisants dans le canton, a elle déploré le glissement stigmatisant que l’initiative opère envers les femmes musulmanes en général et l’islam. Nous sommes d’accord avec elle et son constat que nous sommes amenés à nous prononcer sur un épiphénomène avec une déconnexion claire avec ce qu’est l’Islam en Suisse. Accepter une telle interdiction s’avère contre-productif. Nous votons concrètement ici sur une initiative inscrivant une prescription vestimentaire pour les femmes dans notre Constitution fédérale (alors que les cantons ont toute compétence pour légiférer sur ce sujet).
Pour conclure, il ne faut pas refuser cette initiative parce qu’elle provient de l’UDC mais parce qu’elle est inutile (le code pénal règle les questions de contrainte et menace), disproportionnée (certaines personnes revendiquent de pouvoir s’habiller comme elles l’entendent ou comme elles croient que leur religion le leur prescrit), et placerait dans la Constitution fédérale un article qui relève des compétences cantonales -et déjà réglé d’ailleurs dans certains cantons comme Saint-Gall et le Tessin-.
On n’efface pas l’oppression en supprimant un symbole de l’espace public. L’égalité femme-homme mérite mieux qu’une chasse au symbole électoraliste.