Heureux ceux qui

  • 25. mars 2016
  • air du temps
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Heureux les fiévreux de cœur. Heureux ceux qui ont leurs jambes pour bouger. Heureux ceux qui bougent. Heureux les rescapés des hedge fund, ceux qui ne trahissent pas. Heureux les terroristes qui restent à la maison. Heureux les terrorisés qui sortent dans la rue. Heureux ceux qui n’ont pas peur de mourir. Heureux ceux qui se sont voilés, ceux qui savent parler. Heureux ceux qui vont tête nue. Heureux les chiens vagabonds, les oiseaux migrateurs, ceux qui savent se taire, les truffes humides.

Heureux ceux qui savent recevoir. Ils peuvent donner.
Heureux ceux qui savent couper le son, qui savent siffler.
Heureux ceux qui osent mendier.
Heureux ceux qui ne cueillent pas les fleurs, ne passent pas à côté.
Heureux ceux qui mettent la table, ne tranchent pas les tiges.
Heureux ceux qui laissent venir, ceux qui vont à l’amour.
Heureuses les paumes ouvertes, les porteurs de sève.
Ceux qui tirent les prises.
Heureux d’un printemps.
Heureux ceux qui peuvent aller de tous côtés, leveurs de barrières, dresseurs de barricades. Heureux ceux qui résistent, qui arrosent les plantes, qui désherbent la terre. Heureux ceux qui disent non, sont fidèles aux promesses.
Heureuse Agota Kristof, Monique Laederach, Simone Weil.
Heureux Johann Cruyff, Jacques Ellul, Epictète.
Ceux qui sont morts.
Heureux les désobéissants, ceux qui croient.
Heureux les trublions, les fantasques, les flambeurs.
Heureux les éperdus, les trompés, les capteurs solaires.
Ceux qui font faillite.
Ce poème est pour eux.
Heureux ceux qui ne savent pas compter, ceux qui font des fausses routes.
Heureux les mauvais tacticiens, les leaders d’opérette, les plaideurs bégayants. Heureux les perdants, les trahis, ceux qui évitent le micro, ratent la photo, manquent une marche, loupent le coche.
Ils connaissent la voie.
Heureuse l’herbe.
Heureuse l’écorce.
Heureux le bûcheron.
La chenille.
Heureux ceux qui ont du temps, qui le perdent. Heureux ceux qui se grattent, se grillent. Heureux les chasseurs. Heureux les lapins, ceux qui font des bonds de côté. Heureux ceux qui échappent aux tirs, ceux qui pleurent. Heureux ceux qui attendent, qui pardonnent sans peine, oublient leur passeport. Ils en ont un.
Heureux ceux qui ne prévoient rien. Tout peut arriver.
Heureux ceux qui partent en vacances.
Heureux ceux qui tirent à blanc, sonnent l’alarme.
Heureuse la Pâque juïve, musulmane, animiste ou chrétienne.
Heureux le passage.
Heureux ceux qui tombent.
Ils se relèveront.

 

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